Plantons d’abord le décor. FACEBOOK — créé en 2004 (en accès réservé aux étudiants de Harvard) puis ouvert en 2006 par Mark Zuckerberg — “vous permet de rester en contact avec les personnes qui comptent dans votre vie”. On parle alors de “réseau social”. TWITTER — créé en 2006 par une startup californienne composée d’une équipe visionnaire : Jack Dorsey, Evan Williams, Biz Stone, Noah Glass — “offre à chacun l’opportunité de créer et de partager instantanément des idées et des informations, sans aucune barrière”. On parle dans ce cas de “média social”. Mais alors “Pourquoi utiliser Twitter plutôt que Facebook ?”. Pour tenter d’y répondre, interrogeons quelques notions inhérentes à ces deux plateformes sociales.

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1/ Pour les usages

→ FACEBOOK est à la fois un outil de messagerie (Facebook Messenger), un outil de publication (et d’interaction) avec son cercle d’amis ainsi qu’un espace de jeu (Applications de Social Gaming). Comptant 1,23 milliard d’utilisateurs actifs dans le Monde (28 millions en France, dont la moitié depuis un mobile), le réseau social le plus populaire continue à séduire : près d’1 personne de 18-34 ans sur 2 consulte Facebook dès le réveil et y passe plus de 5h par mois… A noter que le réseau offre la possibilité de créer un profil personnel (pour interagir avec d’autres profils personnels ou intégrer un groupe…) et/ou une page (approche plus professionnelle, représentant une association, une marque…). Au final, ce réseau qui se veut relativement simple, s’avère assez complexe à prendre globalement en main, et le novice — qui aura du mal à se positionner — risque de se perdre quelque peu dans les différentes fonctionnalités ou tout bonnement de se limiter aux quelques actions les plus évidentes.

→ TWITTER est à la fois une messagerie instantanée, un moteur de recherche, un outil de veille et une plateforme de publication. Notez que je ne parle pas de “microblogging” qui, à mon sens, ne signifie pas grand chose et qui renforce les amalgames. Avec ses quelques 241 millions d’utilisateurs actifs dans le Monde (2,3 millions en France et 80% depuis un mobile), Twitter séduit les plus jeunes : 22 ans d’âge moyen, 60% ont -35 ans et 53% des utilisateurs sont des adolescents. L’éventail d’usages possibles de cette plateforme convient ainsi autant aux professionnels du marketing — qui y trouvent la souplesse, la performance et l’ouverture technologique — qu’aux quidams — qui y flanent à loisir ou échangent librement sur leurs sujets de prédilection…

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2/ Pour les données personnelles

→ Dès votre inscription, FACEBOOK vous demande de complèter votre profil avec le plus de détails possible : photo d’identité, formation, métier, dernière expérience professionnelle, goûts musicaux… Jusqu’à votre facette la plus intime : orientations sexuelles, religion… Naturellement vous n’êtes pas obligé de tout indiquer ni même de dire la vérité vraie, mais vous y êtes malgré tout très fortement invité. Toutes ces données sont stockées sur les serveurs de Facebook, en Californie, et échappent ainsi totalement à la vigilance de la CNIL ainsi qu’aux lois relatives à la protections des données personnelles. Cela tombe assez bien puisque ce sont ces données qui vont alimenter l’algorithme de recommandation de la plateforme, pour mieux le vendre aux marques.

→ Pour TWITTER, votre biographie est beaucoup plus succincte. Limitée à 160 caractères, elle ne comporte que les informations que vous voudrez bien y indiquer, sans aucune contrainte. Vous pouvez éventuellement y ajouter un lieu et une adresse de site web : toute lattitude vous étant donnée pour compléter (ou non) ces informations. Celles-ci servent essentiellement à vous permettre de repérer les profils que vous souhaitez suivre et à mieux vous faire connaître. Ces informations stimulent d’emblée le collaboratif et inscrivent ainsi Twitter à contre-courant des pratiques de Facebook.

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3/ Pour le modèle économique

→ Vous l’aurez compris, FACEBOOK utilise nos données à des fins marketing. Non seulement celles que nous livrons volontairement au travers de notre biographie, mais également celles qui sont révélées par l’ensemble des actions que nous effectuons sur la plateforme. Chacune d’elles tisse la toile du Social Graph : cet immense maillage au sein duquel sont reliés toutes nos mentions “j’aime”, nos commentaires, les pages de nos marques préférées, nos dernières photos Instagram… affinant ainsi toujours davantage notre profil. A partir de là, Facebook gagne de l’argent de deux manières : en sponsorisation des publications (ce qui augmente leur portée) et en vendant des espaces de publicité ciblée : par recommandation (ce que vos amis aiment a plus de chance de vous plaire aussi…) et affinités en fonction de la qualification de votre profil.

→ L’activité marketing de TWITTER en revanche est moins intrusive, plus classique. Les bénéfices se font essentiellement sur l’achat d’espace : une marque (ou un particulier) peut faire sponsoriser son profil, ses tweets ou un hashtag (pour qu’il devienne un sujet tendance) à la journée. Nul croisement de vos données de consultation ni de qualification de votre profil.

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4/ Pour le mythe de la sécurisation des réseaux

→ FACEBOOK est à l’origine du modèle de recommandation sociale. Pour que cela fonctionne, l’effort est mis sur la sécurisation de notre cercle d’amis et de nos publications. Cette sécurisation nécessite un paramétrage avancé afin de renforcer l’imaginaire rassurant et confortable d’une sécurisation du réseau. Seuls les profils qui acceptent d’être de vos “amis” intégreront votre cercle. De même, le public ne voit que ce que vous avez paramétré comme étant accessible à tous. En revanche, de nouvelles fontionnalités révèlent les véritables rouages de la plateforme : le Graph Search, moteur de recherche basé sur le Social Graph du milliard d’utilisateurs, permet de trouver une jeune femme de 30 à 40 ans qui habite près de chez vous et qui aime les cupcakes à la fraise et Game Of Thrones ! (et la boucle est bouclée…)

→ TWITTER dispose en revanche d’un système bicéphale : soit notre profil est public (tout le monde voit tout ce que nous publions), soit il est verrouillé (seuls les followers que nous acceptons ont accès à notre Time Line). De même, tout le monde peut suivre un compte public — sans forcément s’y abonner par ailleurs (liste, recherche…) — : s’abonner à un compte relève donc d’un choix, d’une certaine stratégie, et devient ainsi une forme d’acte politique touchant à nos idées ainsi qu’à notre e-réputation.

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5/ Pour être lu

→ Lorsque nous publions un contenu sur FACEBOOK, l’algorithme de la plateforme attribue à celui-ci un score (le Edge Rank) qui permet de sélectionner qui de nos “amis” pourra voir (ou non) cette publication : en l’occurence, ceux avec lesquels nous avons le plus d’interactions. Facebook vend ainsi la possibilité de toucher l’ensemble de nos “amis” (ou “fans” s’il s’agit d’une page). Ce système révèle le modèle vieillissant d’un réseau clanique, technologiquement bridé, au service d’un ciblage éditorial et publicitaire accru, à rebours des pratiques numériques actuelles.

→ Quant à TWITTER, la portée de nos publications est totale : aucun algorithme ne gère qui peut (ou non) voir ce que nous tweetons : tout ce que nous publions est potentiellement visible par tout le monde. Permettant un large éventail d’usages (on peut penser à voix haute, échanger avec des amis, adresser sa veille au monde entier, s’immiscer dans des échanges avec des inconnus, suivre un Live Tweet à l’autre bout du monde…), ce choix est davantage en phase avec le modèle ouvert et collaboratif qui se développe de nos jours, notamment grâce au technologies numériques.

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6/ Pour vivre dans l’instant

→ FACEBOOK enfin est victime de ses propres choix : son algorithme de publication enferme de plus en plus les Community Managers sous une chape de contraintes, l’utilisation de nos données personnelles est controversé… Tous ces éléments tendent à brider la créativité et la liberté d’action des utilisateurs. Par exemple la fameuse règle d’une seule publication maximum par jour qui empêche de vivre l’événement dans sa pleine spontanéité. La plateforme souffre également de la diversité des possibilités d’interactions qui sont proposées — du commentaire au partage, en passant par le simple “j’aime” — : autant d’orientations qui révèlent un modèle viral qui se cherche. Facebook, en recherche constante d’amélioration — rachat d’Instagram pour contrer Twitter et disposer d’une plateforme interne de photos, scission des applications mobile (Facebook + Messenger) —, brouille quelque peu les pistes éditoriales.

→ TWITTER a contrario, même s’il est encore loin du volume d’abonnés affiché par Facebook, est en plein épanouissement : élargissement des cibles, variété des usages… La puissance de cette plateforme repose certainement sur la simplicité du retweet. Ce dernier, élément unique de l’interaction (hormis le favoris), se révèle être un levier majeur du bouche-à-oreilles. Chaque événement peut de fait, sans limite a priori, être raconté, relayé, commenté… avec une simplicité toute naturelle. L’accent est très clairement mis sur l’instantanéité et la viralité, renforçant ainsi l’imaginaire du temps réel et la liberté des échanges. Pas étonnant alors que Twitter devienne le support d’usages nouveaux tels que le Social Customer Service, la Social TV… ou le #TwittMOOC !

 

Vous trouverez un autre billet sur ce thème en forme de témoignage ici : Twitter VS Facebook

Categories: Questions

4 Responses so far.

  1. semiopat dit :

    Bon, on comprend que le rédacteur ou la rédactrice a une préférence marquée pour Twitter 😉 Merci en tout cas pour ce comparatif éclairant.

    Pour ma part, je suis réticent aux réseaux sociaux, pour deux raisons: ils prennent du temps, et j’en passe déjà beaucoup en ligne; ils favorisent/demandent/incitent à une certaine intimité, ce qui n’est pas ma tasse de thé…
    Le TwittMooc m’aide à tester Twitter et son fonctionnement, et peut-être que s’il y avait un Facebook Mooc, j’essaierai aussi, mais autant le premier m’ouvre à des horizons que je n’avais pas soupçonné, autant le second ne m’incite pas outre mesure…

    • insTICE dit :

      Bonjour @semiopat et merci pour ta réaction. J’avoue avoir été quelque peu prosélyte sur ce coup-là 🙂 C’est tout à ton honneur de ne pas te jeter tête baissée dans cette activité chronophage par excellence : chacun en fait ce qu’il souhaite et je dirais même en définit les leviers d’usages. Twitter étant à la fois une messagerie instantanée, un outil de veille, un moteur de recherche (…), c’est toi qui choisi ton degré d’implication, et par là même le niveau d’intimité que tu souhaites mettre en scène. L’idée d’un Facebook MOOC est une bonne idée, même si je pense qu’il faut rester à l’écoute de l’usage plutôt que de l’outil. Ce sont des espaces avant tout pragmatiques, et l’important est de pouvoir t’apporter des billes pour une éventuelle utilisation à des fins pédagogiques, comme tu l’auras bien compris. Enfin, tu as tout à fait raison concernant Facebook : il me semble que les usages sont plus limités dans notre cadre, car il s’agit (dit-on) d’un espace de publication plus « traditionnel », bcp moins propice à l’échange (si c’est cet aspect qui t’intéresse au demeurant), comme peut l’être Twitter 🙂
      À bientôt sur le #TwittMOOC

  2. […] le mur de l’utilisateur via un algorithme (EdgeRank) alors que ce n’est pas le cas sur Twitter. Il faut le savoir … Les médias sociaux apportent la dimension humaine qu’il manque aux outils capables de […]

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